vendredi 25 novembre 2011

Leitlinien der Strategischen Kultur Frankreichs

Globaler Geltungsanspruch in einer Welt im Wandel

Leitlinien der Strategischen Kultur Frankreichs

17.11.2011 | von Frédéric Charillon

DGAPanalyse Frankreich 10, 18. November 2011, 11 S.

Kategorie: Frankreich

Die geopolitischen Veränderungen von 1989 haben die zuvor herausgehobene Stellung Frankreichs in Europa nachhaltig erschüttert und bleiben eine Herausforderung für die strategische Kultur des Landes. Zwar hält Paris an einem globalen Geltungsanspruch, der Europa-Bindung und der nuklearen Abschreckung als Kern seiner Verteidigungspolitik fest. Eine Neujustierung des außen- und sicherheitspolitischen Instrumentariums aber ist unausweichlich.

Suite et téléchargement sur : https://dgap.org/de/think-tank/publikationen/dgapanalyse/dgapanalyse-frankreich/globaler-geltungsanspruch-einer-welt-im

lundi 7 novembre 2011

La Tunisie comme enjeu plutôt que symptôme"

La Tunisie comme enjeu plutôt que symptôme"

Publié sur Lemonde.fr

Rappelons les faits. Environ neuf mois après avoir initié le mouvement qui a conduit à ce que l'on a appelé les "printemps arabes", la Tunisie a conduit le 23 octobre dernier des élections saluées par la plupart des observateurs comme exemplaires dans leur déroulement (en dépit des tensions qui ont éclatées après le scrutin dans le sud, notamment à Sidi Bouzid). Ces élections ont vu la victoire du parti Ennahda avec un score important (41,7 % des votes). Ce parti religieux dont le leader était en exil n'a pas joué de rôle structurant dans les soulèvements de l'hiver précédent, mais sa notoriété, son organisation, la force de son message peut-être, ont fait de lui l'acteur central de la recomposition politique à venir.
Ailleurs, où les soulèvements n'ont pas davantage été caractérisés par des slogans islamistes, plusieurs signaux montrent qu'il faudra peut-être compter tout autant avec les partis religieux. soit parce qu'ils constituent, après des années de lutte contre le régime, une "marque repère" dans le nouveau contexte politique pluraliste (comme les Frères musulmans en Egypte), soit parce que dans un contexte plus chaotique encore (comme en Libye) des acteurs avancent des référents culturels forts, à l'image de la charia, en dépit des réactions que ces mentions ne manquent pas de provoquer au nord de la Méditerranée. Et il n'est pas exclu que nous redécouvrions cette force structurante des acteurs religieux jusque dans des pays où on les croyait réduits par la force depuis longtemps (voir à cet égard Thomas Pierret, Baas et islam en Syrie. La dynastie Assad face aux oulémas, PUF, Paris, 2011).
On peut appréhender ces éléments soit comme symptômes, soit comme enjeux. Comme symptômes, ils prennent une allure alarmiste et conduisent à une analyse figée des sociétés arabes : décidément, cette partie du monde n'est pas faite pour la démocratie, et ceux qui se sont réjouis un peu vite de la disparition des régimes anciens, croyant en la spontanéité des soulèvements observables, auront été bien naïfs. Cette ligne sceptique existe, notamment dans une Amérique du nord (Canada compris), située plus loin de l'épicentre des événements récents, et en bien moindre interaction sociale avec les populations qui en sont issues. Elle peut conduire à préférer des acteurs issus de coups de force autoritaires mais supposés fiables et prévisibles, à des acteurs issus de processus démocratiques, mais dont le label islamiste est jugé inacceptable.
Vu comme des enjeux politiques et non comme des symptômes culturels, ces mêmes situations présentent plusieurs défis – et donc plusieurs opportunités – que la proximité des sociétés européennes avec les sociétés du Sud-méditerranéen nous imposent de relever ensemble.

Enumérons-en simplement trois ici :
 1- l'établissement au Sud de la Méditerranée d'une vie politique enfin pluraliste, qui dégagera des nouvelles marges de manœuvre économiques, sociales et culturelles dans le voisinage stratégique immédiat de l'Union Européenne.
2- la normalisation indispensable des partis religieux dans ce processus politique. Oublions un instant le cliché qui oppose un "modèle turc" à un "modèle iranien", pour rappeler l'importance de voir des partis religieux, qui de toute façon ne disparaîtront d'un coup de baguette magique, accepter le pacte démocratique, c'est-à-dire remettre leur mandat en jeu après une victoire électorale, accepter la défaite, se livrer au jeu des coalitions ou des alliances (relisons à cet égard Ghassan Salamé (dir.), Démocraties sans démocrates. Politiques d'ouverture dans le monde arabe, Fayard, Paris, 1994). Face à la contradiction apparente de prêches virulents, de messages inquiétants, et d'autre part de déclarations d'intentions plus apaisantes, il est important d'aider à construire les cadres de ce nouveau pacte démocratique. Pour paraphraser les mots prêtés à François Mitterrand à propos de Mikhaïl Gorbatchev dans les années 1980, l'important n'est pas que ces nouveaux acteurs – en l'occurrence les partis religieux - soient sincères, mais que tout se passe comme s'ils étaient sincères.
3- Enfin, il nous faudra en Europe réussir la réinvention de la relation avec ces nouvelles classes politiques plurielles, forcément différentes des relations avec des régimes en situation de monopole, jadis incarnés par un individu érigé en interlocuteur unique. Dans cette réinvention de la relation au monde arabe, la France a un rôle à jouer, comme elle l'a revendiqué elle-même depuis longtemps, par exemple lors du discours de Jacques Chirac à l'Université du Caire en avril 1996. Mais c'est collectivement que les Européens devront démontrer leur capacité à sortir d'un discours timoré, et à prendre la mesure des enjeux plutôt que de s'effrayer de symptômes.

dimanche 6 novembre 2011

Annuaires stratégiques français


Trois annuaires stratégiques français

-       -  B. Badie, D. Vidal, Nouveaux acteurs, nouvelle donne. L’état du monde 2012, La Découverte, Paris, 2011.

- P. Boniface (dir.), L’Année stratégique 2012. Analyse des enjeux internationaux, IRIS – Armand Colin, Paris, 2011. 

-  Th. De Montbrial, Ph. Moreau Defarges, Ramses 2012. Les Etats submergés ?, IFRI – DUNOD, Paris, 2011.



Voir aussi sur le site de l'IRSEM

Et mon Twitter

Depuis plusieurs années, la rentrée universitaire française est marquée par la publication d’annuaires stratégiques de renom. Avec quelques autres (comme l’Annuaire français des relations internationales, que nous mentionnerons ultérieurement), trois d’entre eux sont devenus des classiques : l’Année stratégique publiée par l’IRIS chez Armand Colin, L’Etat du monde (éditions La Découverte) et le Rapport Ramsès publié par l’IFRI (Dunod). Ces deux derniers célèbrent même, en cette année 2011, leur 30e anniversaire (le rapport sur L’Année stratégique, quant à lui, a été créé en 1985). Leur formule a évolué depuis leur création, renouvelant les équipes éditoriales, intégrant de nouvelles plumes, s’adaptant, surtout, à l’ère d’internet en prolongeant la publication papier par des bases de données en ligne. Cette offre variée en matière d’analyse stratégique est réjouissante : elle témoigne de l’intérêt que suscitent, dans notre pays, les questions internationales, stratégiques et de défense.

Systématique et chiffrée, L’Année stratégique donne la priorité, région par région, pays par pays, aux données statistiques (et chronologiques) précédées d’un texte d’analyse, à la manière de ce qu’était la version papier de L’Etat du monde il y a quelques années. Le rapport Ramses est peut-être celui qui ressemble le plus à son cousin de référence, le Strategic Survey de l’IISS de Londres, dans sa volonté de passer en revue les grands ensembles géographiques après un premier exercice de synthèse, en s’appuyant par ailleurs sur un appareil cartographique toujours apprécié. L’Etat du monde, enfin, refait désormais sa table des matières chaque année pour présenter en une trentaine d’articles un panorama problématisé de l’année écoulée. Trois exercices complémentaires donc, à l’usage différencié : aide-mémoire pour le premier, synthèse pour le deuxième, essai engagé pour le troisième. A la tonalité différente aussi : délibérément pédagogique (L’Année stratégique), géopolitique (Ramses), ou sociologique (L’Etat du monde). Tous insistent cette année, avec des mots différents, sur la revanche des sociétés, au point de poser, comme le fait le Ramses en sous-titre, la question de « l'Etat submergé ». Submergé par la profusion d’acteurs et de défis, qui remettent en cause la capacité du système à répondre aux inputs. Par souci de balayer l’ensemble du spectre, les deux premiers (Année stratégique et Ramses) se contraignent davantage à la figure imposée (géographique ou thématique), qu’ils renouvellent avec talent. L’Etat du monde se risque davantage à la figure libre, au thème iconoclaste (voir l’article sur « la médiocrité du personnel politique occidental ») ou à la dimension moins internationale (Guy Hermet sur « l’illusion électorale »).

Ces trois exercices ont en commun de s’être convertis à l’analyse microsociale, donc à l’approche de l'international et du stratégique par le bas. Par conviction de longue date, peut-on ajouter, pour les auteurs de l’Année stratégique (voir entre autres les articles « D’Abbottabad à Fukushima, de Chistchurch à Yeonpyeong. L’Asie dans tous ses états », et   « De la colère au soulèvement »), et sans doute plus encore pour ceux de L’état du monde : Bertrand Badie nous avait averti du Retournement du monde dès 1992, il confirme vingt ans plus tard - et les faits avec lui - que « le social défie le politique et fait trembler l’international ». L’action des Etats est pourtant loin d’être absente de ces ouvrages (on relira entre autres « Le jeu de l’Iran en Irak et en Afghanistan », par P-J. Luizard dans L’état du monde, « Etats-Unis : un retour à la grande guerre sous contrainte budgétaire », par C. Brustlein, ou « « Israël et la révolte arabe : la politique du déni », par D. bauchard, dans le Ramses, « Les occidentaux à l’épreuve des crises », par J-P. Maulny dans L’Année stratégique). Et si L’état du monde, contrairement à ses deux voisins, ne consacre pas explicitement de rubrique aux enjeux militaires et de défense, préférant souligner la contrainte que constitue sur eux le nouveaux contexte sociologique mondial, la question transparaît néanmoins régulièrement (voir Ph. Golub, « Les Etats-Unis au Moyen-Orient : un géant impuissant ? »).

Il ressort au final de ces trois annuaires la consécration d’une scène mondiale incroyablement plurielle. Des employés du secteur textile au Bangladesh jusqu’aux « acteurs récalcitrants » - comme les FARC de Colombie ou le mouvement islamiste armé  Boko Haram au Nigéria -, en passant naturellement par les foules des printemps arabes ou les animateurs de Wikileaks, combien d’acteurs sont en mesure, aujourd’hui, de peser directement ou indirectement sur les rapports de force stratégiques, jadis analysés sous le seul angle de la bataille rangée interétatique ? Le passage en revue de cette profusion, au fil des pages, donne le vertige mais de façon salutaire. Plutôt que de s’arrêter à une analyse convenue des réseaux sociaux en Tunisie et en Egypte (le risque existait…), le spectre a été élargi par chacun des trois ouvrages, chacun à sa manière, chacun avec son engagement et ses hypothèses propres. A nous d’en tirer les leçons.

Frédéric Charillon